La bande dessinée est souvent oubliée lorsque l’on parle de la classification des arts. C’est bien dommage car le « neuvième art » est un savant mélange de peinture et de littérature. Pendant de nombreuses années, le fait de lire des bandes dessinées était un acte marginal.
Au fil des années, la pratique s’est démocratisée et de plus en plus d’artistes sont nés. Depuis ses débuts en 1830, la BD est raccrochée à la culture populaire. Pour beaucoup, elle est destinée aux enfants, aux adolescents voire aux jeunes adultes intellectuellement limités. Dans ces livres où images et textes ne font qu’un, l’humour est omniprésent. C’est pourquoi le terme anglo-saxon de « comic-book » est aussi employé pour parler de la bande dessinée.
La naissance des nouveaux héros de la pop culture
En 1938, une nouvelle forme de BD apparaît aux États-Unis avec l’apparition des premiers super-héros. Le premier de ces personnages extraordinaires est « Superman », et la firme qui le produit « DC Comics » connaît alors un réel succès. L’accès à ce nouveau produit culturel est facilité par un prix de 10 cent pour 1 magazine hebdomadaire des aventures du héro. L’innovation scénaristique de ces œuvres est rapidement adoptée par les fans de bandes dessinées et les amateurs de fiction. Pendant et après la seconde Guerre Mondiale, les comics de super-héros sont un moyen pour les personnes de fuir une triste réalité et de rêver d’un monde meilleur. C’est également le moyen de propagande utilisé pour les États-Unis.
L’âge d’or des comics (1938-1954) s’arrête peu après la guerre, à cause notamment de la publication d’un livre dénigrant la bande dessinée. En effet, pour le docteur Fredric Wertham les comics sont responsables des maux de la société des années 50. Selon ce dernier, ces œuvres conduisent la jeunesse vers la délinquance, l’homosexualité et surtout le communisme. Les parents se méfient et beaucoup de héros disparaissent des librairies. Malgré ce déclin de popularité, deux super-héros survivent. Le public reste fidèle aux éternels “Batman” et “Superman”.

Les héros ordinaires aux aventures extraordinaires
À partir de 1960, le comic-book entre dans une nouvelle ère. Les super-héros deviennent peu à peu humains et ont des problèmes similaires à ceux des citoyens ordinaires. Ce renouveau est dû à l’inventivité de trois grands noms de ce courant artistique : Stan Lee, Steve Ditko et Jack Kirby. Ces légendes de la BD travaillent ensemble au sein de la firme « Marvel comics ». Ils vont être à l’origine de certains héros cultes comme : Hulk, les X-men ou encore Spiderman. Entre 1960 et 1972, les comics abordent les thèmes de société sans tabou, les personnages ne combattent plus seulement les ennemis d’un pays. À l’image de Spiderman, il s’agit de justiciers masqués à l’identité secrète. Ils sont confrontés aux différents enjeux de la société : la politique, la liberté sexuelle, la drogue…
Durant cette période c’est donc un travail de fond qui est mené par les artistes de la bande dessinée. Ils se rapprochent le plus possible de la réalité et des mouvements populaires de l’époque. La critique du bloc soviétique reste néanmoins mineure dans le coeur de ces oeuvres. Cependant peu à peu, les comics deviennent de plus en plus obscurs, n’hésitant pas à rompre avec l’idéalisme des héros. Sans oublier, la place occupée par les super-vilains qui ne cesse de croître. En 1988, DC Comics décide de placer le fameux « Joker » en personnage principal d’un album. « The Killing Joke » reste encore à ce jour l’un des albums les plus vendus des éditions DC Comics.

Au début des années 1970, le bloc occidental sens le vent tourner en faveur du bloc soviétique. Ce dernier rattrape l’autre dans le domaine militaire et la menace devient davantage présente. La crainte d’une nouvelle guerre mondiale renaît et la crise de Cuba est encore dans les mémoires. 1 an après cet événement caractéristique de la Guerre Froide, le premier album de la saga X-men paraît. Ces mutants aux pouvoirs extraordinaires renforcent pour certains l’idée d’une troupe d’élite américaine. En 2006, Marvel décide de faire un clin d’oeil à l’histoire en sortant la suite d’albums « First Class ». À l’intérieur, les scénaristes font une liaison entre le débarquement dans la baie des cochons et une intervention héroïque des X-Men.
À travers de telles oeuvres dans les années 70, l’objectif est de créer un univers rassurant grâce aux super-héros. En mélangeant le réel et l’imaginaire, le public conserve l’espoir de jours meilleurs. Pour les marques, la popularité des super-héros sont un moyen de dynamiser une économie moribonde. Les produits dérivés voient alors le jour et le marketing dicte les lignes scénaristiques.
En Europe, l’influence des comics commence progressivement est de plus en plus visible. Les jeunes s’identifient facilement aux super-héros américains, voulant ainsi leur ressembler. En effet, si au début le héros était soit un extraterrestre comme « Superman » ou un riche homme d’affaires comme l’est Bruce Wayne alias « Batman ». Au fil des années le héros pouvait être n’importe qui. C’est ce concept qui a permis à des nombreux lecteurs d’accrocher plus facilement à ce style d’oeuvre littéraire. Les jeunes lecteurs devenus adultes se tournent alors vers des héros plus sombres qui franchissent parfois les limites juridiques. Le comic-book suit donc entre 1960 et 1980 l’évolution de son lecteur tout en en attirant de nouveaux.

Les héros unis pour la patrie
Les années 70 signe la fin des aventures en solitaire de certains héros. Les personnages majeurs de chacune des grandes maisons d’éditions se réunissent au sein d’une aventure commune. C’est alors la naissance des “Avengers” chez Marvel Comics et de la “Justice League” pour DC Comics.
Cependant un groupe de héros plus sombres rencontre un franc succès. Les “Watchmen” ou “les gardiens” en français sont davantage plébiscités par les lecteurs de comics. Au cœur de leurs aventures se trouve un personnage du nom de « Dr. Manhattan ». Ce dernier travaillant dans le domaine du nucléaire devient à la suite d’un accident une arme ultime. Il est alors désiré par les États-Unis pour détruire l’URSS. Son nom n’est pas un hasard car il vient du célèbre « Projet Manhattan« . Le projet de recherche sur la bombe atomique durant la Seconde Guerre Mondiale, rappelant ainsi la puissance militaire et technologique américaine.

Un art vivant avec son époque
Les évolutions technologiques apportées par le cinéma et la télévision ont permis d’accroître la visibilité des héros de comics. L’adaptation sur petit et grand écran des héros de bande dessinée devient un moyen de faire passer des messages au plus grand nombre. Ce n’est pas le hasard si certaines de ces adaptations détournent la version originale du comic. Le but est de représenter des méchants originaires d’URSS ou qui revendiquent des idées communistes. Cette association du communisme au mal contre lequel un héros occidental lutte est omniprésente dans le cinéma entre 1970 et 1990.
Néanmoins il faut préciser que les comics ont souvent rejeté ces idées reçues. En 1976, Marvel Comics a publié un comic-book dans lequel le héros est une super-héroïne soviétique « Darkstar ». Cette dernière rejoint même les héros occidentaux du groupe X-Men. Toujours dans la même période et chez le même éditeur, « Red Guardian » raconte les aventures de six super-héros russes qui s’allient parfois aux héros occidentaux. En effet, dans l’un de ces comics un des gardiens rouges rejoint Captain America dans son combat contre les nazis.

Même si ce style de bande dessinée s’adresse dans un premier aux petits garçons, avec l’omniprésence de héros masculins. Au fil des années, les personnages féminins vont occuper une place de plus en plus importante. Initialement au second plan temps dans les aventures de leurs homologues masculins. Les super-héroïnes se voient gratifier de leurs propres histoires comme par exemple Catwoman, Batgirl ou encore Supergirl. Cela permet alors aux maisons d’édition de toucher un jeune public féminin.
La recherche de la parité homme-femme dans les comics suit les tendances sociétales des années 1970 à 1980. Les auteurs cherchent alors à revaloriser la place de la femme dans la société. D’ailleurs d’après le concept du comic-book insufflé dans les années 60, si le héros peut être n’importe quel citoyen alors pourquoi ne serait-il pas une femme ? Même si l’engouement pour les héroïnes de comics n’est pas à la hauteur de celui des héros masculins. L’influence est croissante, d’ailleurs en 2019, Captain Marvel sera la première super-héroïne dont le film aura un budget équivalent à un homologue masculin.

En conclusion, le comic-book joue un profond rôle social durant la Guerre Froide. Il apporte à ses lecteurs, qu’ils soient riches ou pauvres, l’espoir d’un monde meilleur même bien qu’imaginaire. En Europe de 1970 à 1990, la création de super-héros grâce à l’art de la bande dessinée avait un rôle de médiateur social. Grâce aux héros, les maux de la société réelle étaient transposés dans une oeuvre de fiction. Le comic-book en lui-même est pacifique car il ne fait pas de distinctions de genre, ethnique ou religieux. C’est l’arrivé de canaux de communication de masse qui a orienté les histoires pour en faire des outils de propagande occidentale.
« Un grand pouvoir s’accompagne de grandes responsabilités » Stan Lee
Aujourd’hui, on trouve de nombreux films et séries basés sur des comics. The Punisher, Deadpool, Black Panther, Shazam! … sont devenus populaires grâce à l’exploitation de leurs histoires par le septième art. Voici une sélection d’albums de comics à lire si vous avez apprécié cet article :
- The Killing Joke – DC Comics
- Civil War – Marvel Comics
- Before Watchmen : Rorschach – DC Comics
- Doctor Strange #1 – Marvel Comics
- The X-Men #1 – Marvel Comics
- Daredevil #1 – Marvel Comics
- Wonder Woman Tome 1 – DC Comics
Vous souhaitez en savoir plus sur les films de super-héros et connaitre l’avis d’un expert sur l’actualité de la pop Culture. Je vous recommande de suivre la chaine Captain Popcorn sur YouTube. Pour finir cet article, la bande annonce du film « Black Panther » qui est le premier film de super-héros a être nominé aux Oscars.
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